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Garbage's Box
5 juillet 2018

Rolling Stone , Juillet 2018

2018-06-29-RS-n106  Rolling Stone
n°106
pays magazine: France
paru le 29 juin 2018
article de 2 pages sur Garbage


- INTERVIEW –
Shirley Manson : Garbage et elle

Sophie Rosemont
(
source article
rollingstone.fr
)

2018-06-29-RS-n106-img 

Le deuxième album de Garbage, 2.0, fête ses 20 ans et s’offre une belle réédition. L’occasion de rencontrer la chanteuse du groupe, Shirley Manson, à Londres pour un petit flash back…

Une maison londonienne typique, avec bow window, petit jardin et adorable toutou en option… Plutôt que de s’entretenir avec les journalistes dans un hôtel, Shirley Manson a choisi le domicile d’une des amies de son label anglais. Tant mieux : toujours rousse, l’œil clair, la moue naturellement gouailleuse, elle est détendue et éclate de rire facilement. C’est parti pour une longue conversation sans non dits où on revient sur la genèse et le succès du second album de Garbage, 2.0., son féminisme et la manière dont elle a réussi à s’affirmer, les années passant et le recul aidant. Définitivement, miss Manson est l’une des icônes féminines les plus rock’n’roll de notre époque.

Vous souvenez-vous de l’enregistrement de 2.0 ?
On voulait faire une musique beaucoup plus futuriste que sur le premier album et on avait même un terme pour ça : sci-fi pop. Nos modèles, c’était Massive Attack, Portishead, les Chemical Brothers. On est retourné enregistrer aux Etats-Unis, dans le Wisconsin. La mère de Steve était en train de mourir, Duke vivait les meilleurs moments de son existence et Butch était plutôt en forme. Moi, j’étais résolue à rentrer dans le lard de tout le monde si besoin, m’affirmer davantage que sur le premier album où j’étais arrivée trop tard pour écrire la totalité des textes. Je suis très directe, je n’ai pas le temps d’être timide ou peureuse, c’est ce que j’ai voulu prouver avec 2.0.

Vous avez évolué dans un groupe d’hommes, mais avez collaboré avec des artistes féminines, de Blondie à Sky Ferreira… Besoin de solidarité ?
En tant que chanteuse d’un groupe de rock, j’ai rencontré beaucoup de malveillance ou de jalousie de la part d’autres musiciennes. Alors que je m’étais toujours senti à l’aise avec elles, car j’ai deux sœurs, je suis féministe… En me rapprochant de femmes artistes, j’ai clairement montré que je refusais cette compétition si facilement imposée par la société. Je veux voir les autres femmes comme des alliées. Notre force respective doit nous fédérer. Car même si on a plus de liberté que nos mères ou grand-mères, le chemin est difficile pour s’imposer…

Vous avez travaillé dur pour ça ?
Oui, et une fois que j’avais du succès, je m’en suis voulue… comme si je ne le méritais pas ! Ce n’est que maintenant que j’en profite et l’apprécie vraiment !

Pensez-vous toujours que 2.0 est la quintessence de Garbage ?
Oui. Si je devais choisir un seul album à jouer sur scène, ce serait celui-ci. Le premier album était un succès mais il était totalement bordélique. 2.0, lui, était parfaitement exécuté. Ce qui nous a aidé à ne pas trop vieillir, c’est que nos disques sont de drôles de mélanges. Sans doute parce que nous sommes tellement différents au sein du groupe. S’il y a quelque chose dont je suis fière, c’est ce son authentique et original.

Comment aviez-vous géré l’immense succès qui vous était tombé dessus à l’époque ?
C’était génial, et il nous a permis de faire 2.0 dans d’excellentes conditions, mais j’avais tendance à être agressive. Je suis définitivement très fragile, j’ai donc développé une faculté à tenir les gens éloignés afin d’éviter leurs coups et qu’ils ne se foutent pas de ma gueule. Avec le succès, j’ai d’autant plus gardé les gens à distance. Pourtant, je suis un agneau… Mais dans la presse, on te présente que d’une seule et unique manière, alors qu’en tant qu’humains, nous sommes une multitude de visages en une seule personne, selon notre expérience, notre passif. Bon, cela étant dit, je me contredis tout le temps…

Est-ce pour cette raison que vous êtes partie vivre à Los Angeles ?
Sans doute. On y est anonyme, on peut y renaître, même si on a l’impression d’être cassé en mille morceaux. En Ecosse, en Angleterre, j’étais jugée de toutes parts. J’avais terriblement peur de l’échec, et c’est dans cette nouvelle vie que j’ai accepté l’idée que tout pouvait voler un éclat. Mais que ce n’était pas grave ! J’ai mis beaucoup de temps à me sentir légitime.

Quand avez-vous réalisé que vous étiez une artiste à part entière ?
Jusqu’en 2012, je n’arrivais pas à me préfigurer comme une artiste, je portais ce statut aux nues et je me sentais très au-dessous. Cette année-là, j’ai retrouvé Garbage sur scène à Coachella, et j’ai vu plein de groupes jouer avant ou après nous. Non seulement j’ai réalisé que je n’étais pas moins douée, mais surtout que j’étais nettement meilleure ! Je suis rentrée chez moi, j’ai rappelé les membres de Garbage et je leur ai dit : « on fait un autre album, les gars ! Maintenant ! »

Qu’est-ce que ça fait de remporter un Icon Award, celui du magazine NME ?
Que ce magazine, avec qui j’ai eu une relation passionnelle pendant des années, me choisisse parmi toutes les chanteuses, ça m’a énormément touchée. J’étais très surprise aussi, car c’est vraiment venu de nulle part, Garbage n’ayant pas fait parler de lui ces dernières années ! Bref, j’étais ravie mais j’ai essayé de ne pas le prendre trop au sérieux, surtout avec mes amis qui me charrient en terminant leurs phrases par « n’est-ce pas, ô icône ? »

Qui sont vos propres icônes ?
J’aime David Bowie et Nick Cave mais j’écoute avant tout beaucoup de femmes. Surtout celles qui avait un véritable combat à mener et qui ont été assez généreuses pour partager leur intensité avec le reste du monde : Nina Simone, Maya Angelou, Billie Holiday, ma mère, ma grand-mère, qui était très admirative des suffragettes. Elle était brillante, diplômée en mathématiques et en astronomie, qui a réussi à élever ses enfants alors que son mari était décédé, tout en enseignant son savoir avec passion. C’était une badass granny !

Et vous, on peut dire que vous être tout aussi badass ?
J’espère bien. Et je le prends pour un compliment…

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